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Ma part de Gaulois de Magyd Cherfi

by Anthony del Puerto

Alors que son premier roman, La Vie de ma mère ! (Actes Sud), est dans les librairies depuis le 3 janvier, l’ancien parolier et chanteur de Zebda signait déjà en 2016 une superbe réussite avec Ma part de Gaulois, récit autobiographique sur son enfance et son adolescence dans les quartiers nord de Toulouse. Comment grandir en apprenant « nos ancêtres les Gaulois » alors que l’on s’appelle Magyd Cherfi ? Comment faire concilier les pages du roman national avec celles que les pères ou les oncles ont écrites lors de la guerre d’Algérie du côté des « indigènes » appelés un temps à devenir des « Français à part entière » ? Autant de thèmes soulevés par Ma part de Gaulois qui bouscule les mythes de l’histoire officielle comme ceux des récits familiaux.

Magyd Cherfi © P Garat
Magyd Cherfi © P Garat

Voici donc le parcours d’un gamin, né à Toulouse en novembre 1962, issu d’une famille kabyle, couvé par sa mère, et dont les bons résultats dès l’école élémentaire lui valent d’être traité de « pédale » par ses camarades. Ce qui n’empêche pas le petit Magyd de devenir une sorte d’écrivain public dans la cité, chargé par les uns et les autres de la correspondance familiale ou des courriers administratifs. Quant à l’école de la République, elle est un sanctuaire relatif où « jusqu’à cinq heures on était peu ou prou protégés des « sale Arabe », des « rentre chez toi ». » Le gamin va vite délaisser les parties de foot pour les livres. Il écrit des poèmes malgré les baffes et les coups que ce genre d’occupation récolte de la part d’autres gosses. C’est tout de même mieux que sa copine Bija littéralement tabassée par son père et son frère pour avoir lu un livre.

Bac dans la cité

Peu importe, jusqu’à la Terminale, l’ado s’accroche aux mots, se lance avec passion dans l’atelier théâtre du lycée, écrit des pièces, chante Brassens avec le copain Bébert. Balzac, Flaubert et Hugo sont des présences fraternelles. Antigoned’Anouilh n’est pas loin. Puis, vient le baccalauréat et le miracle a lieu : « Sur mon passage chacun, chacune semblait sonné. Un bac dans la cité dépassait l’imagination, c’était l’homme qui marchait sur la lune, l’inaccessible étoile, l’affaire des Blancs. » Aucun misérabilisme dans ce récit d’initiation où l’on jongle avec les identités et les appartenances. Dans la lignée de Livret de famille et de La Trempe, parus en 2004 et 2007, ce livre âpre et joyeux possède des accents de comédie italienne. Même tendresse, même cruauté. Cherfi se souvient des siens et ils deviennent les nôtres.

Christian Authier

Un livre pour le week-end

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Ma part de Gaulois – Actes Sud

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