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« L’Avventura » de Michelangelo Antonioni

by Léa Vergès

Chaque mercredi, on rend hommage à un grand classique du cinéma. A voir ou à revoir.

Le film aurait pu s’intituler Une femme disparaît, mais Alfred Hitchcock avait déjà pris le titre. Lors de la croisière d’un petit groupe d’amis fortunés dont le yacht fait escale à Lisla Bianca, une île volcanique de l’archipel des Eolienne, Anna se volatilise. Parmi d’autres, Sandro, le fiancé de la jeune femme, et Claudia, la meilleure amie d’Anna, se lancent à sa recherche. La police est alertée. Les recherches se poursuivent et au fil des jours, vont faire naître des sentiments amoureux paradoxaux entre Sandro et Claudia. Lors de sa présentation au festival de Cannes en 1960, L’Avventura – premier volet d’une trilogie prolongée par La Nuit (1961) et L’Eclipse (1962) – déchaîne les passions. Certains crient au génie et saluent la naissance d’un nouveau langage cinématographiques, d’autres ne voient là qu’imposture et ennui. Eternelle querelle entre les Anciens et les Modernes.

S’il est vrai qu’il ne se passe pas grand-chose dans L’Avventura (et que ce pas grand-chose s’étire sur un peu plus de deux heures et vingt minutes), la volonté de Michelangelo Antonioni de faire éclater la narration traditionnelle, de disperser la dramaturgie attendue et de ne pas apporter de réponses aux interrogations du spectateur est au cœur même de sa geste cinématographique. Décors de fin du monde, silences, abstraction, poésie, lenteur, errance des personnages, couples en crise, visages et corps filmés comme des statues ne cesseront de traverser l’œuvre de celui que l’on intronisa comme le cinéaste de « l’incommunicabilité » et l’un des pères du « cinéma moderne ».

Naissance d’une étoile

Bien sûr, impossible d’évoquer L’Avventura en oubliant Monica Vitti, alors compagne d’Antonioni et que celui-ci dirigera à trois autres reprises. Elle éclabousse chaque plan sculpté dans un magnifique noir et blanc, fait circuler du sang et de la vie au cœur d’une galerie de personnages plus ou moins fantomatiques (à l’image d’abord d’Anna – Léa Massari – que l’on ne reverra pas) ou caricaturaux. Une étoile était née. Il faut encore en remercier Antonioni. Toutefois, du cinéaste, on peut préférer L’Eclipse – beaucoup plus incarné et dénué de l’auto contemplation satisfaite que n’évite pas L’Avventura – ou Profession : reporter, autre film sur une « disparition », cette fois celle d’un homme changeant d’identité.

Christian Authier

Cinéma

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