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« Les Complices » de Cécilia Rouaud

by Léa Vergès

Au travers d’un syndrome cliniquement avéré, la peur du sang, Cécilia Rouaud va tresser un film particulièrement malin où il est question de gangsters de la pire espèce et de harcèlement au travail, le tout saupoudré d’une incroyable dose de… gentillesse !

Wiliam Lebghil (Karim), Laura Felpin (Stéphanie) et François Damiens (Max) – SND

Dans une séquence liminaire qui fait froid dans le dos pour finalement nous faire tordre de rire, nous croisons Max, tueur à gages, qui est depuis quelque temps victime d’une étrange maladie. A la première goutte de sang, il tombe dans les pommes.  Impossible donc de continuer son business. C’est ce moment que choisit un jeune couple : Karim et Stéphanie, pour aménager en face de sa maison. Trentenaires alertes et formidablement sympathiques, ils viennent se présenter à leur voisin avec une bouteille de crémant afin de la partager et de faire connaissance. Mal leur en prend, Max leur ferme la porte au nez.  Mais voilà, ce qui doit arriver…

Les jeunes insistent un peu et, apprenant que Max cherche du travail, vont le mettre en relation avec l’agence immobilière qui les emploie, utilisant en sous-sol, tels des esclaves, des salariés chargés de harceler par téléphone le quidam moyen en proposant des offres immobilières mirobolantes. Max est embauché et se lie d’amitié avec Karim et Stéphanie. Sauf que son passé pour le moins tumultueux le rattrape. Karim s’affole alors que Stéphanie, qui ne rêve que d’aventures, peu importe lesquelles, s’enthousiasme à l’idée de devenir complice. Le film est lancé et croyez-moi, vous n’allez pas regretter de suivre ce trio aussi improbable que séduisant et tout simplement attachant.

Nous connaissons les castings cinq étoiles de Cécilia Rouaud, particulièrement celui de Photo de famille (2018). Son dernier opus n’échappe pas à la règle. Max n’est autre que le géant belge François Damiens, un géant au regard aussi dur que foncièrement sympathique. Son personnage ici suit un vrai chemin de rédemption et s’évanouira lors d’un plan final dans un fondu au noir caravagesque. Ce comédien possède une aura qui le place bien au-dessus de la mêlée générale du 7e art. Face à lui, difficile d’exister ? Ce serait mal connaitre Laura Felpin, explosive Stéphanie, et surtout William Lebghil, Karim dont la naïveté et la gentillesse feraient fondre des pierres, le portrait même de l’ami que l’on aimerait tous avoir.

Vanessa Paradis et Bruno Podalydes rejoignent ce casting vraiment au cordeau dans un film qui ne fait pas l’économie d’une charge féroce sur les call centers. Si ce n’est pas l’essentiel du film c’est en tout cas l’occasion de scènes tragi-comiques à hurler de rire. Un film tout en subtilité, moralement peu correct mais pétri de bonnes choses et dont les saillies sanglantes sont surtout des cheminements vers une autre vie, plus lumineuse. Un film qui fait du bien.

Robert Pénavayre

Cinéma

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