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Elvis, un film de Baz Luhrmann

by Bruno del Puerto

L’ange et son démon

Après Freddie Mercury et Céline Dion, voici un nouveau biopic et rien moins que celui du King : Elvis Presley. Peut-être fallait-il un cinéaste aussi flamboyant que l’australien Baz Luhrmann pour affronter ce mythe. Dans tous les cas la réussite est totale.

Elvis
© Warner Bros Pictures

Le réalisateur du vertigineux  Roméo + Juliette  se lance dans une aventure téméraire : conter la vie du plus grand chanteur de rock’n roll de tous les temps, celui qui , à juste titre, a troqué son patronyme pour celui de King : Elvis Presley (1935-1977). Nous le suivons depuis son adolescence jusqu’à ce jour fatal de 1977 qui, en fait, vit naître une légende toujours formidablement vivace parmi ses fans aujourd’hui. Mais le scénario ne se contente pas, façon de parler bien sûr, de suivre les traces du chanteur car cet unique panorama occulterait un autre personnage, un double aussi indispensable à sa carrière que maléfique sur bien d’autres points, le fameux Colonel Tom Parker. Cet homme mystérieux, en fait un apatride ayant fui les Pays Bas pour des raisons pas très nettes s’appelait Andreas Cornelis van Kuijik (1909-1997). Aboyeur de cirques, manager à la petite semaine, il découvre un jour un jeune homme qui se fait entendre dans un tour de chant discret.

Rapidement, Tom Parker, qui a tout de même alors de l’expérience dans le métier, va tout faire pour s’en rapprocher, lui faire miroiter Hollywood et surtout signer un contrat d’exclusivité.  Fort de tout cela et avant tout du talent d’Elvis, il lance la comète Presley à la radio, la télévision, le cinéma et les maisons de disques.  Assurant derechef la fortune du jeune homme et…la sienne. Manipulant l’artiste a ses fins personnelles, entre autres parce qu’il n’avait pas de passeport pour l’accompagner à l’étranger, Tom Parker va s’enrichir bien au-delà des termes du contrat… Ce sont donc deux destins étroitement enlacés qui nous sont révélés à l’écran, l’un dans la lumière des sunlights, l’autre dans l’obscurité des coulisses et des studios. Deux destins parallèles qui finiront par se rejoindre dans le temps.

Elvis
© Warner Bros. Entertainement Inc

Elvis succombera à des prises massives de médicaments nécessaires au rythme infernal de ses contrats. Tom Parker lui survivra mais dépensera sa fortune au jeu, une addiction qui le poursuivra toute sa vie. Il mourra ruiné. Pour Elvis, Baz Luhrmann a jeté son dévolu sur le jeune Austin Butler. Bingo, le résultat est bluffant. Physiquement d’une troublante ressemblance, vocalement stupéfiant, du moins pour les débuts de la carrière du King dont il chante lui-même les tubes, pour les années finales se sont des bandes originales, scéniquement parfaitement crédible, avec ce regard de velours tout à la fois empreint de candeur et de volonté. Face à lui, Tom Hanks déroule tout son talent, et il en a, pour tracer le portrait d’un véritable vampire plein de bienveillance mais ne pensant qu’au business. Son Colonel Tom Parker est digne des plus terrifiants Murnau. 

Un son magistral et des images d’une flamboyance hyper « bazluhrmanienne » achèvent d’installer ce film parmi les meilleurs de cette année cinématographique.

Robert Pénavayre

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